Mon Québec se bâtit à coups de crayon,
à coups de mots, à coups de cœur!
Il se crée à coups de gueule,
à coups de pinceau, à coups d’idées!
Il s’invente à coups de rêves.
Contre les vents puissants qui érodent l’âme des nations,
nous avons toujours en nous, fière et vivante, cette étincelle
qui fait de nous l’envie du monde entier :
Nous sommes Québécois et créateurs!
Et l’un ne va pas sans l’autre!
Sous les projecteurs de la scène,
dans les garages de village
sous les fluorescents des laboratoires,
dans les champs, dans les forêts, sur la mer,
À coups de patentes à gosses,
de bebelles insolites,
de gréements fascinants!
On réinvente chaque jour notre Québec!
Contre vents et marées, contre les peurs et la domination
On s’est tenu debout en donnant aux choses établies un autre sens!
Parce que nous taire, on n’a jamais su!
On fait de nos forces, un spectacle,
de nos solitudes, un poème,
de nos chicanes, une blague!
On chorale! On turlute! On oxygène!
On chante aux accents d’Afrique,
aux accents des McGarrigle
De l’Île d’Orléans à Natashquan,
de Saint-Vallier Montréal à la forêt des mal-aimés.
Lindberg hallucine et les foufounes se font électriques!
Nous taire? Jamais!
On parle! On phrase! On gueule!
On falardeau! On chartrand!
Nous sommes un peuple de toutes les histoires et de toutes les littératures!
Nos hivers sont des pages blanches sur lesquelles on peut tout réécrire!
De l’inespéré et de l’inattendu,
Des survenants et des hommes rapaillés.
Des complaintes de phoque, des charges d’orignal
Des Plouffe, des Caleb, des Belles-sœurs!
Des belles bêtes et des énigmes du retour.
Nos imaginaires sont comme nos aurores boréales : sans frontières!
On est faiseur de moulin à images,
échassier qui jongle avec la planète,
improvisateur dans le ring de la sainte flanelle.
On danse, on gigue! On quadrille!
On continental! On se « la la la » dans les airs!
On dessine, on sculpte, on est automatiste,
Nos courtes-pointes ont des motifs arabiques,
Et Gilles Carle filme notre vraie nature!
Nous taire, baisser les yeux, cesser de bouger, nous le refusons globalement!
Je n’ai pas 20 ans!
J’écris le « Vaisseau d’or »!
Je n’ai pas 20 ans!
Je présente mon robot à Expo-science! Je compose le Concerto de Québec! Je crée une ONG!
Je n’ai pas 20 ans!
J’invente la motoneige! Je décrypte le génome humain! Je lutte pour des amours différentes!
Je n’ai pas 20 ans!
J’ai un cœur de pirate! Je récite le cantique de la loi quantique! Je plante des arbres!
Je n’ai pas 20 ans!
J’invente un jeu vidéo! Je monte les marches de Cannes! Je viens en aide à Haïti!
Et chacune de mes créations participe à la beauté du Québec
et cette beauté se conjugue en français!
Notre langue que nous avons su protéger contre les speak white!
Notre langue, que les travailleuses d’ici, pour se rappeler à elle,
ont décorée d’un « e », d’un « euse » et d’un « ice »!
Notre langue, fragile dans chacun de nos gestes du quotidien,
dans chaque pas que l’on fait vers l’autre.
Notre langue aura toujours besoin de notre créativité!
Gens du pays!
Créateurs d’hommes partis dans le Nord et des retrouvailles dans le Sud.
Inventeurs d’hivers terribles et d’étés trop courts!
Gens du pays!
Magiciens de l’esprit, débrouillards devant l’éternel.
Québécois et Québécoises de toutes les régions et de toutes les métropoles!
Gens de l’avenir! C’est votre tour de vous laisser parler d’amour!
Michel Marc Bouchard est l’auteur de plus de 25 pièces, toutes créées au théâtre. Ses oeuvres sont traduites en plusieurs langues et jouées régulièrement un peu partout à travers le monde y compris au Japon. Diverses productions de ses pièces ont remporté de nombreux prix, notamment Les feluettes, L’histoire de l’oie et Les muses orphelines.
Boursier du Conseil des Arts du Canada, du Conseil des Arts de l’Ontario, du ministère de la Culture du Québec et de la Fondation Beaumarchais (Paris), il a été auteur en résidence au Théâtre de Quat’Sous et au Théâtre du Nouveau Monde (Montréal), au New Dramatist de New-York, au Banff Center for the Arts (Alberta), au Festival de Limoges (France), à l’Université d’Ottawa et au Teatro della Limonaia (Florence). Les adaptations de ses pièces au cinéma (Les feluettes-Lilies) et à la télévision (L’histoire de l’oie/The tale of Teeka) lui ont valu maints éloges et plusieurs prix.